Quand on parle de portage salarial, on pense sécurité sociale, retraite, chômage. Bref, tout ce que l’indépendant classique n’a pas. Mais il y a un angle mort dont beaucoup de portés ne se rendent compte qu’au moment où il est déjà trop tard : la responsabilité civile professionnelle, la fameuse RC pro. Et croyez-moi, c’est un sujet qui mérite plus qu’un coup d’œil distrait aux petites lignes du contrat de portage. Pour ceux qui veulent aller en savoir plus, il existe des ressources détaillées, mais commençons par la base.
La RC pro, c’est l’assurance qui vous couvre quand une mission tourne mal et que le client se retourne contre vous. Imaginez : vous êtes consultant IT, vous installez un système, une erreur de paramétrage met à l’arrêt le site e-commerce de votre client pendant 48 heures. Deux jours de chiffre d’affaires envolés, des centaines de clients furieux, et une direction juridique qui cherche un coupable. Sans RC pro, ce coupable, c’est vous, avec vos économies personnelles en première ligne.
En portage, la société qui vous emploie souscrit en principe une RC pro globale pour l’ensemble de ses salariés portés. Bonne nouvelle ? Oui, mais pas suffisant. Car cette couverture est pensée pour le volume, pas pour la spécificité. Les plafonds d’indemnisation peuvent être bien en dessous des montants de risques que vous prenez réellement. Un formateur en bureautique n’a pas la même exposition qu’un expert cybersécurité sur un projet bancaire. Pourtant, la RC pro « standard » va souvent les mettre dans le même sac.
C’est là que les ennuis commencent. Parce que si votre contrat ne couvre pas toute la casse, le reste peut retomber sur vous. Et la RC pro, c’est typiquement le domaine où la différence entre « ça passe » et « ça casse » se chiffre vite en dizaines de milliers d’euros.
Un autre point souvent négligé : les exclusions. Toutes les RC pro en ont. Certaines ne couvrent pas les prestations à l’étranger, d’autres excluent des domaines jugés « sensibles » comme la santé, la finance ou la cybersécurité. Si vous intervenez dans ces secteurs et que vous ne lisez pas en détail ce qui est exclu, vous prenez un risque majeur sans même le savoir.
Alors que faire ? La première étape est simple : lire. Oui, lire le contrat de portage, ligne après ligne. Pas le résumé commercial, mais les conditions générales et les annexes. La deuxième étape : confronter ces limites avec votre réalité métier. Si vous intervenez dans des environnements critiques, il peut être judicieux de souscrire une RC pro complémentaire en votre nom. C’est un coût, mais c’est aussi une tranquillité d’esprit.
Certains objecteront que le portage est censé « tout gérer ». C’est vrai, mais ce n’est pas une garantie absolue. La société de portage vous offre un cadre, pas une immunité totale. En clair : vous avez le confort administratif, mais la responsabilité morale et financière reste en partie sur vos épaules.
Un exemple concret : Sophie, consultante en marketing digital, a vu une campagne de son client mal paramétrée. Résultat : des milliers d’euros dépensés en clics inutiles. Sa société de portage était couverte, mais uniquement jusqu’à un certain plafond. Au-delà, c’était pour elle. Heureusement, elle avait anticipé et souscrit une extension de garantie. Sans ça, sa marge d’une année entière serait partie en fumée.
La RC pro en portage, c’est donc une zone grise : sécurisante en apparence, mais qui demande un minimum de lucidité et d’anticipation. Considérez-la comme un airbag : tout le monde espère ne jamais s’en servir, mais celui qui roule sans prend un risque insensé.